Emergences

L’Un-l’Autre est un trait d’union entre notre modernité et la psychanalyse d’orientation lacanienne. Il nous conduira jusqu’au Forum Campus psy 2021 qui aura lieu le 2 octobre. 

 

Penser le moment actuel est nécessaire au regard de la clinique. Se faire « docile » [1] aux positions
subjectives, toujours inédites parce que singulières, implique une attention renouvelée aux formes contemporaines du Malaise dans la civilisation [2].
Ainsi, comment lire et interpréter ce qui se joue dans la montée au zénith social des études de genre (gender studies) ? Dans la rencontre avec l’Autre sexe ? Le discours de la science, tel qu’il aborde « l’affaire
sexuelle » [3], entraîne à certains égards une forclusion du sujet. Nous proposons ici de lui redonner place selon la partition qui suit.

 

Cinq axes seront à l’étude.

Anatomie et destin subjectif éclairera le (non) rapport entre le discours de la science et le sujet. Trans/détrans, dysphorique/euphorique, binaire/non binaire, mais comment le sujet s’embrouille et se
débrouille-t-il avec sa jouissance ?

La montée au zénith des particularismes précisera en quoi les revendications identitaires poussent les uns-tout-seuls au communautarisme. Plutôt que de favoriser le lien social – en témoigne
l’entrée récente au Larousse du terme « racisé » –, quels peuvent être en effet les effets ségrégatifs du langage ?

Hors normes. « Je ne suis ni homme, ni femme, ni gay, ni lesbienne, ni hétéro… Je suis moi » [4], telle pourrait être
la formule de ce troisième axe. Face à la pluralisation des noms-du-père, « l’individualisme moderne » [5]  favorise la multiplicité
des identités.

Stylé ! Avoir la classe, soigner son style, se défaire des règles d’usage et de la langue… S’habiller aux couleurs de sa jouissance. Lorsqu’il s’agit de rencontrer l’Autre sexe, de faire avec le
non-rapport, à chaque Un son style symptomatique !

L’amour, encore ? Selon Jacques-Alain Miller, le « débat d’aujourd’hui, en particulier concernant le lien sexuel, se déroule, comme prévu par Lacan il y a maintenant trente ans, entre
routine et invention » [6]. Des signifiants fleurissent quant à la rencontre des corps. Ainsi, quels sont les nouveaux arrangements entre les
sexes ? Oserions-nous : hommes, femmes, que reste-t-il ? 

Un feuilleton : « L’affaire David Reimer ».

Nous vous proposons de parcourir la tragique histoire de David Reimer, à partir du livre du journaliste John Colapinto intitulé Bruce, Brenda et David. Ayant subi une réattribution sexuelle à ses huit mois, ses parents
décident de l’élever comme une fille, avec le soutien de John Money, psychologue et pionner de la théorie du genre. Pour connaître la suite, ne manquez pas de lire chaque nouvel épisode.

Le glossaire répertoriera les mots et nouvelles créations verbales pour dire l’unicité et les revendications identitaires associées. Les néologismes sont multiples, les définitions aussi.

 

À chaque nouveau numéro, L’Un-l’Autre vous proposera de nouvelles définitions, des comptes rendus d’articles, d’émissions, de tribunes et d’ouvrages ainsi qu’une petite touche musicale qui donnera le tempo.
Maintenant que la première mesure est donnée, vous trouverez ci-dessous les informations nécessaires pour nous adresser vos contributions vives et éclairantes !

 

Nadège Duret

[1].  Miller J.-A., « Docile au trans », Lacan Quotidien, no 128, avril 2021, disponible en ligne.

[2].  Cf. Freud S., Malaise dans la civilisation, Paris, Points Essais, 2010.

[3].  Lacan J., Le Séminaire, livre xix, …
ou pire, Paris, Seuil, 2011, p. 100.

[4].  Énoncé extrait d’un reportage intitulé « Photographie : sexualités alternatives et transidentité », disponible sur Arte.

[5].  Miller J.-A., « Les six paradigmes de la jouissance », disponible sur internet.

[6].  Ibid.




Contributions

Pour un article : 1500 signes maximum

Pour le glossaire : entre 500 et 900 signes maximum

Pour la playlist : étonnez-nous !

À adresser à Nadège Duret – duret.nad@gmail.com et Philippe Carpentier – philicar@orange.fr

Un grand et beau cri

Élisabeth Marion

Le désir d’être une femme

Guillaume Miant

Les Femminielli

Karine Soubaigné

Zoom sur l’amour

Lydia Danto

Programme

Programme

Gentils coquelicots Mesdames

Comment ne pas penser, avec notre belle affiche, à cette comptine populaire enfantine, Gentils coquelicots mesdames ? Dans « Le silence des coquelicots », Michel Chandeigne traduit pour nous cette chanson moins légère qu’elle n’y paraît : « Ce bel air évoque la transformation de la jeune fille en jeune femme après ses premières règles. Le coquelicot est l’image des lèvres du sexe rougies par le sang menstruel. » [1] Après l’éclosion de l’amour avec le rossignol qui chante, les choses se corsent. « À peine [la jeune fille] s’empare-t-elle de trois brins, que l’urgence est de la prévenir du danger : les hommes, prédateurs dont il faut absolument se défier. La sentence est sans appel, ils “ne valent rien”, les garçons “encore moins” »[2]. Nous voilà donc au cœur de notre thème : l’affaire sexuelle. Si le traitement qui lui est réservé dans la chanson est largement désuet, il nous rappelle que chaque époque tente de répondre à la jouissance du corps qui, toujours, fait désordre. Elle est l’occasion de souligner que dire « les hommes » aussi bien que « les femmes », comme ensembles, élude le réel de l’affaire, soit comment chacun se débrouille de son propre coquelicot, unique, ce qui ne coïncide jamais tout à fait avec soi-même.
L’illustration que nous propose Philippe Carpentier avec Ophelia, le tableau de John Everett Millais, nous rappelle par ailleurs la signification mortelle du coquelicot, indice d’une jouissance en jeu. D’ailleurs, est-elle vraiment morte Ophéli ? Millais ne laisse-t-il pas le doute planer avec cette pose extatique ?
Sarah Camous-Marquis
[1] Chandeigne M., « Le silence des coquelicots », in Sigila, n°29, 2012. En ligne : https://www.cairn.info/revue-sigila-2012-1-page-81.htm
[2] Ibid.